EN RECEVANT A DIMANE LE CONSEIL DE L'ORDRE DES JOURNALISTES
Mgr SFEIR: "LES CIRCONSTANCES NE ME PERMETTENT PAS ENCORE DE ME RENDRE A DAMAS"

En recevant, mardi dernier à Dimane, le conseil de l’Ordre des journalistes présidé par M. Melhem Karam, S.Em. le cardinal Nasrallah Sfeir a qualifié de “profonds” ses rapports avec le chef de l’Etat, disant qu’il est le président de tout le Liban et assume ses hautes charges d’une manière parfaite.
De plus, il s’est prononcé en faveur de la petite circonscription (électorale), a déploré le fait pour l’accord de Taëf d’être appliqué d’une façon sélective et lié sa visite au Chouf au retour des personnes déplacées de la montagne.
Quant à sa visite à Damas, l’éminent prélat a précisé que les circonstances ne permettaient pas encore qu’il l’effectue. Mais il a mis l’accent sur l’importance des relations historiques existant entre le Liban et la Syrie, en plus de leur destin commun.
Enfin, il a invité les responsables à faire face à l’échéance de la paix.


L’éminent prélat entouré du président
et du conseil de l’Ordre des journalistes au
salon du siège patriarcal à Dimane (Liban-Nord).

LA PAIX SERA-T-ELLE INSTAURÉE AU P.-O.?
Interrogé, tout d’abord, sur la conjoncture régionale, après l’accession du leader travailliste à la présidence du Conseil en Israël et ses prévisions quant à l’avenir, Mgr Sfeir répond:  Naturellement, nous espérons et le monde avec nous, que le conflit du Proche-Orient trouvera sa solution, de même que la cause palestinienne, afin de pouvoir instaurer la paix. Des promesses et des déclarations rassurantes ont été faites; seront-elles tenues et concrétisées? Nous l’ignorons, car des promesses similaires avaient été faites, précédemment et n’ont pas été tenues.
Mgr Sfeir pense que les responsables libanais doivent se préparer à cette paix que nous attendons depuis un demi-siècle. Il faut, en tout cas, que l’occupant évacue, inconditionnellement, notre territoire, en vertu des résolutions de la légalité internationale, la paix devant être basée sur la justice et l’équité.
A propos de sa visite au Chouf, le cardinal-patriarche dit qu’elle interviendra après que les personnes déplacées de la montagne auront réintégré leurs maisons et leurs terres. Or, leur retour a bien tardé à se réaliser et nous voulons le consacrer, au lieu de le précéder.

LIBAN-SYRIE
De sa visite à Damas, le cardinal Sfeir émet ces réflexions: Naturellement, nous voudrions nous rendre en Syrie, parce que c’est le pays le plus proche de nous, d’autant qu’il existe entre nous des intérêts communs, une Histoire et un patrimoine. Cependant, nous disons que le Liban est un pays indépendant, comme la Syrie. Il est de notre intérêt que des relations amicales existent entre nous, tant au plan politique, que commercial et économique.
Mais en même temps, le Liban doit assumer ses responsabilités comme tout Etat indépendant et souverain. Malheureusement, ceci ne s’est pas réalisé jusqu’à ce jour.
Les circonstances ne me permettent pas encore de me rendre à Damas.
Au sujet de la nouvelle loi électorale en cours d’élaboration, Mgr Sfeir, tout en rappelant ses prises de position hostiles à la loi sur base de laquelle ont été organisées les législatives de 92 et de 96, se prononce en faveur de la petite circonscription où les candidats et les électeurs se connaissent. Si la petite circonscription n’est pas retenue, les résultats du scrutin ne reflèteront pas la volonté populaire et la représentation nationale ne sera pas parfaite.

QUID DE L’EXHORTATION APOSTOLIQUE?
Du synode pour le Liban ayant tenu ses assises à la Cité du Vatican, à l’initiative de S.S. Jean-Paul II, dans une tentative de la part du Souverain Pontife de faire taire le canon dans notre pays, Mgr Sfeir évoque les recommandations diffusées à l’issue de la rencontre à laquelle ont participé de nombreux hommes de religion et personnes laïques. Le Saint-Père, rappelle-t-il, a rendu public à partir de Beyrouth le texte de l’Exhortation apostolique qui traite, d’abord, de questions religieuses dans sa première partie; puis, de questions nationales. Sa Sainteté y engage les Libanais, tant chrétiens que musulmans, à sauvegarder, en le raffermissant, leur désir de vivre en commun et de favoriser l’instauration de la véritable démocratie.
D’aucuns prétendent que l’Exhortation apostolique a été classée. Je ne suis pas de cet avis, car ce précieux document ressemble à l’Evangile et au Coran. On doit toujours y  revenir et c’est ce que nous faisons.

PAS DE POLITIQUE MAIS DES QUESTIONS NATIONALES
A la question: “D’aucuns vous font grief, ainsi qu’au Conseil des archevêques de traiter de questions politiques dans vos homélies dominicales et les communiqués diffusés à l’issue de vos réunions mensuelles. Qu’auriez-vous à leur répondre?”, Mgr Sfeir déclare: Ceci n’est pas exact: nous ne faisons pas de la politique, mais évoquons des questions de caractère national, pour contribuer à redresser la situation dans le même esprit que le fait l’Exhortation apostolique.
Puis, nous recevons beaucoup de gens qui nous exposent leurs doléances et leurs plaintes, car ils n’ont pas la possibilité de frapper aux portes des gouvernants, à qui nous transmettons les revendications des administrés.
Il en est de même par rapport au communiqué mensuel des prélats. Ceux-ci viennent de différents diocèses et se font l’écho des plaintes de leurs ouailles. Je crois qu’en plaidant en faveur de l’égalité, de la liberté, de la justice et des droits de l’homme, l’opinion publique doit nous comprendre et apprécier notre conduite et non le contraire.
Du rapport établi entre le palais de Baabda et Bkerké, le cardinal Sfeir dit: Nous avons souhaité le succès au président Lahoud, car son succès est le succès du Liban dont il est le chef. Nos relations avec la présidence sont excellentes et il n’est dans l’intérêt de personne qu’elles ne le soient pas.

DU DÉCRET DE NATURALISATION
Mgr Sfeir ne cesse de critiquer le décret en vertu duquel des centaines de personnes ont acquis la nationalité libanaise, sans en avoir le droit. La loi sur la naturalisation, ajoute-t-il, doit être juste, ceux qui seront naturalisés devant savoir qu’il s’agit pour eux d’un honneur et non d’un droit acquis. C’est ce qui a lieu en France et dans les pays évolués.
Du sentiment de frustration que ressentent certains citoyens, Mgr Sfeir le juge justifié, surtout quand les gens se plaignent de ne pouvoir rentrer dans leurs droits et obtenir justice sans avoir besoin d’intermédiaires.  Il faut, dit-il, consolider l’entente nationale pour que tout rentre dans l’ordre.
“Malheureusement jusqu’à ce jour, l’accord de Taëf est appliqué d’une manière sélective. Or, nous l’avons accepté parce que c’était l’unique moyen de faire taire le canon chez nous.
Quant au retard mis au retour des personnes déplacées, Sa Béatitude l’attribue au manque de fonds. Ceci est déplorable, car si les gens ne réintègrent pas leurs régions initiales, cela signifie que la vie en commun est menacée. Il faut donc que les déplacés puissent retourner à leurs villages pour mettre un terme à un problème humain qui a trop duré.”


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